Pierre Fédida


Psychopathologie de l’expérience du corps

Le corps comme exigence de travail pour la pensée

La psychanalyse occupe une place première dans le questionnement, renouvelé par la clinique psychopathologique, de la reconnaissance des liaisons entre corps et psyché. Le recentrement sur l’expérience du corps témoigne davantage encore de la force d’attraction entre corps et psyché et permet d’en instruire les processus d’interdépendance dans une élaboration métapsychologique indispensable.
Les auteurs de cet ouvrage proposent, chacun, des voies d’ouverture à la fois complexes et différentes. Pour Rosine Debray, la référence à l’école psychosomatique de Paris, dans les prolongements des travaux de Pierre Marty, constitue le pivot de l’étude du fonctionnement psychique du sujet psychosomatique dès l’origine. Christophe Dejours développe les nécessités du travail de pensée exigées par le corps érotique et notamment la subversion libidinale qu’il détermine à travers des symptomatologies plurielles. Pierre Fédida, enfin, arrime son étude de l’hypocondrie à la métapsychologie du rêve et de la mélancolie, et en analyse le paradigme transférentiel dans la situation analytique.
Ces trois études originales, rigoureuses et approfondies affrontent avec vigueur et ténacité la problématique primordiale de la sexualité et de la mort et des destins pulsionnels qui les animent.

Auteurs : Christophe Dejours, Pierre Fédida

Avec Rosine Debray.
Collection Psycho Sup, Dunod.
Parution : 13 juin 2002.
Réédition : 10 février 2005


Des bienfaits de la dépression

Éloge de la psychothérapie

Suffit-il de supprimer les symptômes de la dépression pour en guérir ? Peut-on évacuer si facilement la souffrance psychique qui est au fond de l’état déprimé ? Peut-on, comme par enchantement, retrouver le désir de vivre, de rêver et d’agir ?
Psychanalyste, Pierre Fédida montre ici pourquoi la psychothérapie aide à revivre. Les médicaments ont toute leur utilité, mais ils ne guérissent pas du malaise de l’existence. Pour cela, il faut être deux, et donner du temps – pas forcément longtemps. Alors, et alors seulement, la pensée, la parole et l’action redeviennent possibles.
Et si la dépression survenait dans ces moments où la vie cherche à se protéger et à se transformer ? Alors, comment faire bon usage de la dépression ?

Collection Psychologie, Odile Jacob.
Parution : 12 janvier 2001.
Réédition : avril 2009


Par où commence le corps humain

Retour sur la régression

Par où commence le corps humain ? La question inspirée par Georges Bataille entraîne ici à ce retour sur la régression. Cette notion – quelque peu tombée en désuétude chez les psychanalystes – est sans doute apparue à beaucoup comme trop empreinte d’évolutionnisme ou encore d’usage vulgarisé et désormais privé de pertinence technique et métapsychologique. C’est alors ignorer la référence qu’elle constitue dans la compréhension de l’engendrement du cadre, notamment avec les patients réputés difficiles.
Ce livre ne cherche pas à récapituler les théories de la régression. Il se donne pour projet d’interroger la vue de l’analyste dans la cure et ce qu’il en est de son côté, de sa propre capacité de régression à l’écoute de son patient. Dissymétrie sans doute : il n’en reste pas moins que la valeur accordée à la régression hallucinatoire transférentielle dépend des conditions de réception et de construction dont l’analyste dispose dans sa propre régression.
Ces questions s’ouvrent nécessairement sur l’analyse de l’analyste et sur sa formation à la pratique analytique.

Collection Petite bibliothèque de psychanalyse, PUF.
Parution : 01-12-2000


Demain, les psychotropes ?

On l’a dit et écrit : la consommation des psychotropes dans de nombreux pays développés ( dont la France ) a déjà transformé une question de médecine et de psychiatrie quotidiennes en une « question de société ».
Ce qui est d’abord visé, c’est bien sûr l’accroissement des dépendances dans des contextes psychosociaux déréglés ou désorganisés. Mais on ne tarde pas à mettre en procès la politique des industries pharmaceutiques et la négligence des pratiques médicales de prescription diversement et puissamment influencées. L’arrivée sur le marché de nouvelles molécules correspondant à une nouvelle génération de médicaments ouvre la voie à des spéculations parfois alarmistes sur les risques de conditionnement neurochimique des humains.
Il fallait donc revenir sur cette question des psychotropes. Et déployer cette question en prenant le temps de mesurer toutes ses implications. Parmi celles-ci : la formation du psychiatre prescripteur, la qualification d’une substance chimique comme médicament, la place de la psychothérapie, la dynamique neuro-comportementale des psychotropes…

Auteurs : Guy Darcourt, Pierre Fédida

Avec Roland Jouvent, Pierre Simon, Édouard Zarifian.
Collection Forum Diderot, PUF.
Parution : 1er novembre 1998


Actualité des modèles freudiens

Langage – image – pensée

Auteurs : Pierre Fédida, Daniel Widlöcher

Presses Universitaires de France, 1995


Le site de l’étranger

La situation psychanalytique

« J’étais pour toi transparente comme l’air et tu étais aussi imposant qu’un archéoptéryx, oui, je crois que c’est le nom de ces mystérieux oiseaux fossiles d’avant le déluge. » C’est en ces termes que, dans la « cure d’amour » entreprise avec Norbert Hanold, Zoé-Gradiva se désigne étrangère de là où elle voit la monstruosité fossile du symptôme. Le lieu étranger — toujours en mouvement — réalise l’apparence. L’air, la transparence, le fossile : tel pourrait être le titre de ce livre. L’hallucination négative en est le centre, comme on le dirait de l’origine d’une parole dans sa régression transférentielle. La situation analytique est là toute entière — soit jamais une fois pour toute installée, toujours asymptotique. L’étranger est certainement l’analyste présent en personne mais c’est l’absence et sa non-personne qui forment l’étrange étranger de l’interlocuteur. Le site de l’étranger ne saurait être occupé — sauf imposture du rôle — par l’analyste en personne !

Mais la psychanalyse aurait-elle disparu à l’insu des psychanalystes trop prompts à revendiquer de multiples façons le statut d’une place qui les identifie ? On serait parfois tenté de le croire lorsqu’on voit le discours psychanalytique gagné par l’idéologie pragmatiste de l’inter-action et de la fameuse relation inter-personnelle. Tout les « concepts » peuvent ainsi chavirer et le nominalisme d’un vocabulaire commun entretient le concensus qui, par définition, est un leurre. L’idéologique de la théorie disqualifie ainsi le pouvoir du mythe fondateur. L’événement du meurtre du père est cet événement du premier poète-héros : il est par excellence celui de l’epos du langage qui seul conserve la trace d’un meurtre qui a eu lieu et reste toujours à accomplir. Le site de l’étranger, c’est l’étrangèreté de l’inconscient dans le langage, c’est la mémoire généalogique du transfert et de son rêve de sépulture, c’est l’ancêtre absent qui a figure de père dans son essence d’absence.

Collection Quadrige, PUF, 1995.
Réédition : 13 mai 2009


Crise et contre-transfert

On sait que Freud n’a pratiquement pas théorisé le concept de contre-transfert et qu’il a laissé à l’état d’ébauche métapsychologique celui de transfert qui, du point de vue psychopathologique, est pensable comme le processus critique par excellence. Le transfert est crise et même selon la seule acception que la psychanalyse peut accorder à ce mot, en ce sens où le rêve est une psychose dans la nuit de chacun et où tout symptôme est la modalité d’existence critique et clinique d’une théorie singulière et occulte de soi. Dans ces conditions, le concept de contre-transfert ne gagne-t-il pas à rester celui de l’implicite métaphore négative du père dans l’analyse ?
Pourtant, la nécessité d’ouvertures cliniques de la psychanalyse à des « pathologies » qui paraissaient hors de son champ, a entraîné de très nombreux travaux à accorder une importance technique et théorique centrale au concept de contre-transfert. Comme si c’était le contre-transfert qui venait à subsumer la crise et, dès lors, à servir d’instrument psychique prévalent de l’observation et pour la compréhension des expériences critiques vécues par les patients. D’où le renforcement de certaines significations accordées à la technique psychanalytique et des changements tout à fait déterminants de la structure et de la fonction de la théorie.

Collection Psychopathologie, PUF, 1992.
Réédition : Collection Quadrige, Essais Débats, 13 mai 2009


Corps du vide et espace de séance

L’influence du corps et le processus somatique pendant une psychanalyse ou une psychothérapie soulèvent toujours des interrogations et n’ont pas perdu leurs actualités. Cet ouvrage, épuisé depuis plus de trente ans, est à la fois une référence et un témoin de la période de réflexion intense qui caractérise la psychanalyse des années 1970-1980.

On y trouve notamment le début d’une double approche, phénoménologique et psychanalytique, qui prend appui sur la pratique clinique dite des « cas difficiles » – questionnant dans le vif l’analyse, l’analyste et leurs limites. La réédition de cet ouvrage a été envisagée par l’auteur peu avant sa mort. Pierre Fédida a rédigé – à cet effet – une nouvelle préface un quart de siècle plus tard.

Un débat de fond s’ouvre au sujet des pratiques en psychothérapie. Dans la première édition, l’auteur signalait déjà : « Sous l’apparence de progrès thérapeutique, les techniques corporelles constituent fréquemment une entreprise de régression sauvage. Il ne fait donc pas de doute que ces techniques – alléguées comme psychothérapeutiques – se conçoivent comme une contestation de la psychanalyse. » Et de prévenir : « N’oublions pas que la folie se joue dans le glissement du corps, entre les corps, outre les mots. – Le corps s’entend essentiellement du vide et de l’absence. Le lieu de son écoute – serait-ce l’écoute d’un voir ou d’un toucher – s’appelle espace de séance. »

Collection Corps et culture, Éditions Universitaires.
Parution : 7 décembre 1989.
Réédition : Collection Psychopathologie fondamentale, MJW, décembre 2012


L’absence

La psychanalyse est, par essence, une expérience de l’absence. Absence à laquelle les psychanalystes s’empressent habituellement de donner une cause : l’objet perdu. Ou bien ils la réduisent à des figures repérables : la séparation, le deuil, la castration. Mais n’est-ce pas là oublier que la moindre de nos « représentations » est déjà la relique d’une absence, que tout ce que nous appelons psychisme est tissé par l’absence ?
D’où la singularité de la démarche de Pierre Fédida. C’est cette absence irréductible à un absent assignable et pourtant constitutive du sujet humain qu’il interroge et qu’il rend sensible dans le mouvement même de sa pensée. L’interrogation – mieux, la méditation – porte principalement sur l’« écrire » et l’« entendre » du psychanalyste, sur la dépression et la mélancolie, sur le jeu et la métaphore, la dissymétrie et l’intervalle. Un dernier chapitre développe et regroupe les thèmes qui s’entrelacent dans les chapitres précédents en se centrant sur la spécificité de l’activité théorique en psychanalyse.

Collection Connaissance de l’inconscient, Gallimard
Parution : 14-09-1978
Réédition : folio essais, Gallimard, 6-05-2004


Le concept et la violence

En évoquant l’époque de la libération sexuelle et des soifs de libertés en tous genres. l’auteur a analysé. en 1977, les textes qui en faisaient le point. Cette réédition inspirera ceux qui ne l’ont pas vécu et rappelleront aux plus âgés l’importance de renouer avec ces débats passionnés et passionnels dont on a oublié la portée : « Il est une violence neutre, sans visage et sans mains. Neutre elle est,  en effet, par l’objectivité totalitaire du concept qui “ comprend ” le corps, la mort, le sexe, la folie. Les sciences humaines ordonnent l’exercice violent de ce concept dont la toute-puissance est le signe avoué de son impuissance.
Les textes ici réunis prennent principalement appui sur une expérience des rapports de violence dans la psychose et la perversion, au regard du concept parental. Nul n’est plus dévoué à comprendre son enfant que le parent du fou. Avec lui le psychologue, le psychiatre et parfois le psychanalyste ! A quelle fascination livre le concept de la folie au point de lui laisser commettre ce meurtre psychique où la mort elle-même est devenue impossible. »

Collection 10/18, UGE, 1977.
Réédition : MJW, 2013


Dictionnaire abrégé, comparatif et critique des notions principales de la psychanalyse

Larousse, 1974


Bisexualité et différences des sexes

Au commencement était le mythe, limpide comme les eaux dans lesquelles se baignaient Hermaphrodite et Cénis. Le premier, bel adolescent, fut violé par la nymphe Salmacis ; dans sa détresse, il obtint des dieux, dit Ovide, « que tout homme, après s’être baigné dans ces ondes, n’ait, quand il en sortira, que la moitié de son sexe » ; la deuxième, la plus belle des vierges de Thessalie, fut violée par Neptune, le dieu des eaux, qui exauça son vœu qu’après un tel outrage elle n’en subît plus aucun et lui accorda de n’être plus une femme, mais un guerrier que nulle flèche ne pourrait atteindre. L’insaisissable entre-deux, tel est ce qu’ont en partage ces deux métamorphoses : celle qui aboutit à la fusion mortifère des deux sexes et celle où le changement de sexe procure l’avènement d’un phallus immortel, à condition de ne jamais perpétuer que le même. À l’origine, un viol, une intolérable effraction pour un corps qui se voudrait sans faille et pourrait se combler lui-même. Tout corps étranger est alors menace, tout désir déjà corps étranger. À l’arrivée, deux fantasmes différents, voire opposés, dont le mythe de la bisexualité tente l’impossible conciliation : un fantasme, tout positif, visant à assurer la pleine possession d’un phallus – paternel et maternel – dont l’excellence ne saurait être qu’imparfaitement incarnée, signifiée, dans l’un et l’autre sexe ; un fantasme, négatif, visant à se garantir contre toute séparation-castration-mort, qui conduit à un effacement toujours plus accentué du sujet désirant. Glorieuse métamorphose ou mortelle « amorphose » ?

Auteurs : J.-B. Pontalis, Didier Anzieu, Pierre Fédida

Avec Jean-Marc Alby, Claude Aron, Luc Brisson, Christian David, Willem Fliess, André Green, Masud Khan, Roger Lewinter, D.W. Winnicott, Robert J. Stoller, Marie-Christine Pouchelle, Herman Nunberg, Joyce Mc Dougall, Léon Kreisler, Georg Groddeck, Jean Gillibert, Françoise Cachin, Felix Boehm.
Nouvelle revue de psychanalyse N°7, Gallimard.
Parution : 1973, réédition : Folio/Essais, Gallimard, 2000