
La logique destructrice radicale qui régit inconsciemment le voir humain n’a jamais été étudiée comme telle, y compris par la psychanalyse pourtant la première concernée.
Par contre, les légendes et la pathologie la clament sans équivoque : avec d’un côté la croyance au mauvais œil, le mythe du Basilic « qui tue par le regard » ; et de l’autre les photophobies, l’angoisse du regard, les innombrables troubles de la vision, etc.
Cette méconnaissance provient de ce que Freud s’est trouvé comme inhibé dans son élaboration sur ce sujet : G. Bonnet analyse les raisons et les méfaits de ce blocage en reprenant ses analyses du narcissisme, de l’hystérie, des perversions.
Il démontre ensuite les effets de ce voir implacable dans la cure, dans l’œuvre littéraire : celle de Bataille, et dans une affection étonnante : l’anémie provoquée ou « syndrome de Lasthénie de Ferjol », dont il apporte ici la première étude psychanalytique exhaustive.
Ce livre est d’actualité, car notre époque est dominée par une poussée à voir sans précédent : le problème ne vient pas tant de ce que l’on montre trop de violence, mais de ce qu’un voir sans limites est fondamentalement violence et qu’il fait constamment resurgir la destruction pour s’en repaître et pour se justifier.
Auteur : Gérard BonnetCollection Bibliothèque de psychanalyse, PUF.
Parution : 1er août 1996
Sommaire
INTRODUCTION
PREMIÈRE PARTIE
Émergence du voir pulsionnel dans la théorie freudienne
Les trois temps de la découverte
1. Narcisse, ou la naissance des désirs visuels.
- Le voir inconscient naît sous l’action fulgurante du regard de l’autre
- La légende
- La version freudienne de la légende
- Le mythe : une omission étonnante de Freud
- Le rôle joué par le regard
- Le point critique : de la vengeance de l’amour à l’amour de la vengeance
- Les deux ressorts du retour ou de la « réflexion »
- La naissance au désir de voir : le moment visuel
2. Œil pour œil : pulsion ou perversion ?
- Deux façons de réagir aux regards
- Quelques rappels
- Les conditions de la première théorisation
- La spécificité manifeste des perversions par rapport aux pulsions
- La spécificité réelle des perversions du voir
- Une violence que Freud aborde à son insu
- La pulsion et ses « déterminants »
3. Le premier qui voit l’autre : les désirs visuels chez l’hystérique.
- Quand le désir de (faire) disparaître l’emporte : l’hallucination négative
- Charcot, Freud et l’hystérique : du microscope à la macropsie hystérique
- La toute première étude de Freud sur l’hystérie
- Le premier temps d’une découverte
- L’hystérie : un guide irremplaçable mais trompeur
DEUXIÈME PARTIE
L’organisation des désirs visuels dans l’expérience analytique
Le dispositif visuel
1. Le rêve au rétroviseur : Rôles et fonctions de l’œil et du regard dans la cure psychanalytique.
- Pour voir, en surmontant l’angoisse de disparition et l’idéalisation
- Rôle inaugural : un œil, un regard, et quatre fonctions
- De la pulsion au dispositif visuel
- Rôle pivot : le moment visuel
- Le dispositif dans l’analyse proprement dite
- Le rôle de l’œil et du regard dans la résolution du transfert
- Conclusion
2. L’œil de G. Bataille. De l’analyse à l’écrit.
- S’approprier l’œil de l’autre et faire disparaître celui qui l’incarne
- Rappels d’histoire
- Un procédé peu orthodoxe
- L’axe œil/regard, ses rôles et ses fonctions
- La violence du voir et sa visée d’appropriation
3. D’un voir à l’autre.
- À propos de la « Psychogenèse d’un cas d’homosexualité féminine »
- La (re)naissance du voir
- Un essai d’analyse
- Un acte manqué… réussi ?
- Un dispositif à toute épreuve
- Conclusion
TROISIÈME PARTIE
Le dispositif visuel dans la clinique en l’un de ses objets privilégiés
Du syndrome de Lasthénie de Ferjol aux saignements menstruels
1. Les saignements provoqués dans la littérature. Un dispositif visuel à trois axes
ÉCRITS CLINIQUES ET LITTÉRAIRES
- La littérature médicale : la naissance d’un syndrome
- La littérature romantique : Une histoire sans nom
- La violence du voir selon l’auteur des Diaboliques
- Autres romans et récits analogues
- La littérature psychanalytique
DU MIROIR A LA TACHE DE SANG
- L’œil et le regard d’Hippocrate
- Le point de vue de Barbey et ses limites
- Le miroir de l’analyse
TROIS MIROIRS POUR UN SEUL SUJET
- L’exemple de Freud et les exigences qu’il impose
- L’activité ou la passivité
- Rendre au sujet la place qui est la sienne
2. Les saignements provoqués dans la clinique psychanalytique.
- Du geste au signifiant visuel
UNE HISTOIRE DE SANG
- Un rêve typique
- Le dispositif visuel
- Un double trio familial
- Le démon du voir dans tous ses états
LA SIGNIFICATION DU SANG ET DES SAIGNEMENTS
- Les saignements et la problématique phallique
- Le sang en tant que signifiant ordinaire
- Conséquenses nosologiques : mise en perspective
- De l’oralité à l’exhibitionnisme
- Un signifiant qui pose le sujet face à un autre sujet
- Concluons
- Voir… rouge ?
3. Du syndrome aux troubles menstruels.
- Dispositif et message : ce que le voir veut dire
- Le dispositif commun et les deux façons de le rejoindre
- La médiation du fantasme
- Du fantasme au message en retour
- Retour au réel
- Pour conclure : retour aux sources, de Lasthénie à Emma Eckstein
CONCLUSIONS
Bibliographie
Index des noms propres et auteurs