
Les controverses ou débats encore récents entre psychanalyse et sciences cognitives sont peut-être déjà dépassés ! Et ce n’est pas sans une légitime fierté que notre Revue peut se considérer avoir modestement œuvré à un tel dépassement — du moins parmi ceux qui la fréquentent.
Alors que l’appel à la psychologie cognitive et aux neurosciences est de bon ton dans un nombre croissant de travaux psychanalytiques — notamment au sein de l’Association Psychanalytique Internationale —, on devine aisément, dans certains cas de ralliement récent, qu’un tel aggiornamento n’est pas dénué d’ambitions de pouvoir. Les départements de psychologie ou de psychiatrie qui étaient jusque-là à prédominance psychanalytique ne seraient-ils pas menacés dans leur propre vocation de recherche si leurs programmes ne comportaient pas une intégration de la référence théorique et expérimentale aux sciences cognitives ? Si on peut se féliciter de l’ouverture dont témoignent aujourd’hui certains psychanalystes à l’égard de disciplines qui leur étaient jusque-là étrangères, on doit faire preuve d’esprit de distinction s’agissant de savoir ce qui relève de l’opportunisme politique et idéologique et ce qui correspond à un véritable esprit de recherche depuis longtemps confirmé. Depuis le début, nous avons ici même activement défendu cet esprit de recherche et l’intérêt pour la confrontation théorique des modèles pourvu que chacun des champs spécialisés approfondisse sa propre spécificité théorique et méthodologique. Et nous n’avons jamais manqué de mettre en garde contre les pseudo-intégrations interdisciplinaires qui relèvent plus d’un esprit administratif que de la recherche scientifique. Il n’est donc pas nécessairement de bon aloi de vouloir moderniser la métapsychologie par apport de modèles soi-disant disponibles à la rationalité de la psychanalyse alors que leur origine neuroscientifique ne rend guère féconde la pratique des analogies. […]
Revue Internationale de Psychopathologie, n° 18
Presses Universitaires de France
Parution : 03-1995
Sommaire
Editorial
Neurosciences : neuropsychologie et neurologie
Guy Tiberghien, Marc Jeannerod, Pour la science cognitive. La métaphore cognitive est-elle scientifiquement fondée ?
Francis Eustache, Béatrice Desgranges, Bernard Lechevalier, La neuropsychologie de la mémoire entre conscience et inconscient
Didier Le Gall, Olivier Sabouraud, De l’apraxie idéatoire à l’atechnie. Propositions théoriques et cliniques
Recherches en cours
Nadine Proia, « Setting » psychanalytique et processus conversationnels
Image
Eloïse Ungaro, L’artiste et la belle endormie. Une gravure d’Albert Dürer
Etudes critiques
Georges Lanteri-Laura, Psychiatrie clinique (S. Follin, Vivre en délirant)
Bernard Andrieu, Du biologique au sociologique : la voie de l’organisation régulatrice (H. Laborit, La légende des comportements)
Actualités bibliographiques. Livres et Revues
Les auteurs de ce volume