
En 1972, le président Georges Pompidou gracie le collaborateur criminel Paul Touvier. Il dit à cette occasion : « Le moment n’est-il pas venu d’oublier ces temps où les Français ne s’aimaient pas ? » Le pays devrait effacer une période remarquable et complexe de son histoire, Occupation et Résistance incluses.
Jean-Michel Rey analyse les paradoxes de l’amnésie volontaire décrétée. Il en fait l’historique, de la révocation de l’édit de Nantes déclarant « nulles et non avenues » les lois en vigueur, ou de Louis XVIII revenant au pouvoir avec pour mot d’ordre « union et oubli », au ministre de la guerre ordonnant à l’armée d’oublier ce qui vient de se passer – l’affaire Dreyfus –, et à la guerre d’Algérie.
Le souverain des temps troublés croit chasser le trouble en décrétant l’oubli. Or, en voulant retrancher une part de l’histoire nationale pour restaurer l’unité perdue, il donne à voir le ressort stupéfiant de ce qu’il veut que l’on occulte.
Avec les penseurs de l’oubli – que sont notamment Michelet et Péguy, Freud et Faulkner –, Jean-Michel Rey dérange la visée, individuelle et collective, de l’interdit du souvenir.
Auteur : Jean-Michel Rey
Collection penser/rêver, l’Olivier.
Parution : 14 octobre 2010