
Une anthropologue enquête sur un épisode jusqu’ici ignoré de l’histoire de l’ONU, un virage qui s’effectue de 1998 à 2001. Une majorité d’États refusant désormais de reconnaître l’universalité des Droits de l’homme, l’organisation internationale se rabat sur leur justification implicite par les religions. L’« Alliance des civilisations » qui est proposée à l’époque pour enrayer ce qu’on a appelé le « clash des civilisations » se transforme en une « paix des religions ». On assiste ainsi à une déraison du langage où « civilisation » signifie d’emblée « religion », où « religion » connote « suprêmement honorable, et où « critique de la religion » s’appelle « racisme », « intolérance », « haine » ou « islamophobie : la languie ressuscitée du 1984 d’Orwell creuse l’ornière d’une prétendue « tolérance » nouvelle.
Ces pages rigoureuses montrent ce que L’Avenir d’une illusion – l’essai de Freud sur les idées religieuses – est devenu, en décrivant les effets actuels de l’« illusion » sur une organisation dont la raison laïque fut, à l’origine, le principe même.
Auteur : Jeanne Favret-Saada
Collection penser/rêver, l’Olivier.
Parution : 4 mars 2010