Les journées ouvertes

samedi 18 janvier 2014

de 9h30 à 18h00
Hôtel le Méridien Étoile
81, Boulevard Gouvion-Saint-Cyr
75017 Paris

La conviction en question

La conviction désigne, dans une perspective psychanalytique, une forme singulière d’investissement psychique d’un énoncé de vérité. À ce titre elle intéresse la pratique et l’éthique de la cure, la confiance investie dans l’expérience autant que les rapports entretenus avec la théorie et la diversité de ses modèles métapsychologiques. La conviction engage l’intégration de la psychanalyse, ses développements et sa transmission, dans le champ culturel. « Je suis convaincu » : la grammaire et l’étymologie disent qu’une conviction s’impose au moi.

Mais, contrairement à la notion de croyance qui évoque davantage une forme d’adhésion immédiate et non critique à un énoncé tenu pour vrai, la notion de conviction suppose un travail de l’entendement confronté à l’expérience de la preuve. Elle opère par le dépassement du doute et de l’incrédulité initiale, elle offre les apparences d’une garantie fournie par un rapport logiquement fondé à la vérité. Elle représente donc un acquis qui s’inscrit dans l’être, le transforme et le fait autre qu’il n’était « avant ». La conviction « me tient » autant que j’y tiens. Elle me constitue. De fait, dans sa dimension rationnelle, la conviction s’accompagne d’un investissement affectif du jugement qui puise aux sources narcissiques et pulsionnelles. Sans quoi il n’y a qu’opinion, acquiescement sans passion à une assertion, pure concession intellectuelle, repaire des formes les plus radicales de l’incrédulité : « Vraiment très intéressant ! » rétorque à Freud la « jeune homosexuelle », en rien convaincue par les interprétations qu’il lui propose. La conviction dans la dynamique d’une cure s’appuie sur cette forme particulière de preuve affective fournie par la répétition transférentielle. Elle procède d’une combinaison des processus primaires et secondaires, elle obéit au temps long de la perlaboration ponctué de fulgurances. Quelle place accorder à la conviction dans l’entreprise, la poursuite et la terminaison d’une cure ? La seconde règle fondamentale requise par la méthode freudienne, conduit l’analyste à faire l’expérience de la conviction du bien fondé de la découverte freudienne à partir du plus intime et du plus conflictuel de sa propre vie psychique. Elle seule vise à rendre l’analyste disponible à l’écoute, et l’acquiescement intellectuel ne saurait suffire. Si, selon Freud, avec sa propre analyse l’analyste acquiert la conviction de la réalité de l’inconscient, dans quelle mesure la conviction règle-t-elle le rapport du psychanalyste à la théorie et appartient-t-elle aux conditions nécessaires à l’exercice de sa pratique ? Rien ne garantit de pouvoir faire tenir ensemble, en un même objet psychique, ambition de vérité, satisfaction pulsionnelle et intérêt narcissique. Et si la conviction participe activement aux processus de transformations qui font de la cure autre chose qu’un exercice stérile et désaffecté, elle peut aussi bien être à l’origine d’impasses et de risques chaque fois que l’épreuve de l’analyse vient se heurter à l’inamovible, basculer dans la certitude psychotique, le démenti pervers ou l’influence hypnotique, chaque fois qu’elle se met au service exclusif de la complétude narcissique et des satisfactions hallucinatoires. La solidité de la conviction peut compromettre le flottement de l’écoute et de la parole, la disponibilité à la rencontre de l’inattendu ou du nouveau dans la pratique aussi bien que dans la théorie, et oeuvrer pour l’inertie, l’auto-validation et les détournements idéologiques de la doctrine. Exit alors la recherche de vérité avec son doute inhérent, et en fin de compte l’irréductible inadéquation au coeur du langage entre le mot et la chose. La conviction, expression singulière de l’investissement pulsionnel et narcissique des productions de l’esprit sert plusieurs maîtres à la fois.

Intervenants :
André Beetschen, Catherine Chabert, Philippe Valon

Discutants :
Michael Parsons, Léo Bleger, Évelyne Sechaud

Renseignements et inscriptions :
24, place Dauphine, 75001 Paris
tél : 01 43 29 85 11,
courriel : lapf@wanadoo.fr